La communication dominante autour du défi climatique et environnemental s’inscrit, probablement à raison, dans un champ plutôt pessimiste : réchauffement climatique, diminution des ressources naturelles, 6ème extinction de masse du vivant, perspectives de crise sociale et économique forte…
Alors même que notre société doit s’engager dans un processus de transformation profond de nos modes de vie nous peinons à construire un discours positif sur ce sujet.
Pourtant la transformation induite par le défi climatique et environnemental ne sera possible qu’à condition de travailler une vision positive et mobilisatrice.
Pour cela, il est nécessaire de créer de nouveaux récits collectifs et individuels autour de la transformation écologique de nos organisations et territoires.
Les récits actuels à l'épreuve des limites planétaires
Récit collectif : idée ou histoire fédératrice qui rassemble un groupe de personnes.
Au coeur des collectifs humains on retrouve la notion de récits : il s’agit d’un moyen crucial pour notre espèce de raconter le monde, de s’y projeter individuellement et d’adhérer ensemble à une perspective commune.
Autrement dit : le récit est un outil que nous pratiquons tous et qui nous permet ainsi de nous inscrire dans la dynamique du monde qui nous entoure. Il s’agit également d’un outil collectif pour bâtir un horizon commun.
Le constat de l’atteinte des limites planétaires du fait de nos activités, et des conséquences associées, nous oblige mécaniquement à interroger et repenser le récit collectif actuel dominant.
Intégrer dans nos récits la question des limites planétaires suppose ainsi de renoncer à certains éléments structurants de notre époque : la croissance illimitée, le productivisme, ou bien encore le matérialisme.
A travers ce renoncement, il est possible de tendre vers un imaginaire proposant une nouvelle vision de notre société articulant d’autres modèles : modèles énergiques renouvelables, essor de la mobilité douce, modes de production et de consommation responsable, abandon de certaines pratiques… L’ensemble de ces modèles ayant vocation à s’inscrire dans des perspectives positives pour l’individu et le collectif : résilience, qualité de vie, …
Au coeur de la notion de récit on retrouve donc la capacité de l’humanité à imaginer une nouvelle façon « d’habiter le monde » et de s’y projeter. C’est un outil de mobilisation puissant qui concerne l’ensemble des acteurs de la société : institutions, entreprises, acteurs médiatiques, monde culturel, citoyens…
Dépasser la crise pour désirer le monde de demain
La perspective d’un effondrement n’est pas nécessairement le levier le plus mobilisateur : on peut se mobiliser pour éviter le pire ou pour construire un monde meilleur !
De la dystopie…
… à l’utopie !
La création d’imaginaires positifs et désirables va permettre de diffuser des valeurs (solidarité, partage, entraide, etc.) et normes sociales (mobilité douce, décroissance, fait- maison, etc.) plus respectueuses du vivant, de modifier progressivement les représentations du monde et de faciliter le changement des comportements.
Ces récits sont susceptibles de se construire à plusieurs échelles :
- A l’échelle collective : il s’agit du projet collectif qui comporte nécessairement une dimension politique et dans lequel les pouvoirs publics jouent un rôle fondamental ;
- A l’échelle de l’organisation : il s’agit de créer des espaces d’actions pour devenir acteur de cette démarche de transformation ;
- A l’échelle individuelle : il s’agit d’aligner son mode de vie dans la perspective de ce récit en devenir et de contribuer ainsi à la dynamique collective ;
C’est la coexistence de ces différents récits qui rend possible la démarche de transformation systémique en agissant sur tous les leviers de la transformation.
Bâtir un nouveau récit pour mobiliser les leviers de la transformation
Les leviers de la transformation impliquent différents niveaux d’applications. Le premier niveau concerne les propositions que l’entreprise peut mettre en œuvre elle-même via des décisions internes, politiques ou des changements de pratiques opérationnelles, tandis que le deuxième niveau englobe celles qui nécessitent l’engagement de l’écosystème de l’entreprise (parties prenantes externes : clients, communautés locales, partenaires, etc). Enfin, le troisième niveau implique l’intervention des pouvoirs publics ou des adaptations réglementaires et législatives pour la mise en place des propositions.
Pour plus de détails, ci-dessous le Grand Défi des entreprises pour la planète qui illustre parfaitement le chemin de la transformation et ses différents niveaux.
Le Grand Défi des entreprises pour la planète : le chemin de transformation
Les leviers de la transformation mettent en évidence l’importance de la collaboration entre les différents acteurs pour réaliser des changements positifs pour un monde durable et sobre.
Pour réussir à enclencher ces leviers, et accélérer la démarche de transformation, il est nécessaire de renforcer différents aspects au sein des organisations :
- La conscientisation : Les nouveaux récits encouragent la réflexion critique sur notre mode de vie et notre système économique, et remettent en question les valeurs et les croyances prédominantes.
- L’éducation et la diffusion des connaissances : Utiliser les connaissances pour informer et former les individus via des initiatives éducatives, de médias indépendants, de conférences, d’ateliers et de plateformes en ligne. L’accès à l’information est essentiel pour prendre des décisions éclairées et participer activement au changement.
- L’expérimentation et la mise en pratique : les nouveaux récits doivent encourager l’action en invitant les individus à s’engager collectivement pour défendre des valeurs et des actions concrètes. L’action permet d’installer une dynamique de changement : création de communautés durables et résilientes, d’entreprises responsables, de modèles économiques et organisationnels innovants…
- La collaboration et la construction de réseaux : Les nouveaux récits encouragent la collaboration et la construction de réseaux entre les différents acteurs du changement : les chercheurs, les entrepreneurs, les décideurs politiques, les organisations non gouvernementales et les communautés locales. En travaillant ensemble, ces acteurs peuvent renforcer leur impact, partager leurs connaissances et leurs ressources, et construire des alliances pour promouvoir des solutions durables.
- La transformation des politiques publiques : construire des politiques publiques qui favorisent la soutenabilité, la durabilité et la sobriété de notre société. Cela peut inclure des propositions de réglementations environnementales plus strictes, de soutien aux énergies renouvelables, de promotion de l’économie circulaire, de redistribution des ressources…
L'intégration au coeur des récits individuels et collectifs du projet de redirection écologique de nos modes de vie, de production et de consommation est un levier essentiel pour mobiliser autour d'un projet de société soutenable.